Nous ne sommes pas la Hollande !
Nous ne sommes pas la Hollande !

Nous ne sommes pas la Hollande !

Même le pays paradis du vélo n'a pas toujours été ce qu'il est aujourd'hui

Article publié le vendredi 08 septembre 2017 à 15h35 et mis à jour le lundi 13 avril 2020 à 14h50.

Depuis quelques jours, les reportages et articles à propos du plan vélo de la ville de Paris s'accumulent dans les médias. Et dans les commentaires et autres réactions aux micros des journalistes, l'automobiliste parisien dénonce souvent une chose : "On a pas la culture hollandaise !" ou encore "Nous ne sommes pas la Hollande !"

Précision importante. La Hollande n'est pas un pays, c'est une région des Pays-Bas (Hollande-Septentrionale et Méridionale). Cette vérité étant rétablie, passons maintenant à une petite leçon d'urbanisme historique.

Vive la voiture

Au sortir de la seconde guerre mondiale, l'Europe toute entière est meurtrie. Il faut reconstruire. Il faut relancer l'emploi.

Et pour relancer l'emploi, il faut que les gens puissent se déplacer. Les difficultés d'approvisionnement et notamment la pénurie de charbon induisent la production de petites voitures économiques (époque de la Renault 4CV - 1946). Le Plan Pons en France relance l'industrie automobile. En Europe, malgré des débuts difficiles, la production de voiture triple durant les Trentes Glorieuses.

C'est le boom économique des années d'après-guerre. De plus en plus de personnes ont les moyens de s'offrir une voiture.

La révolution automobile est en marche. Les urbanistes voient en elle le transport du futur. On lui déroule le tapis rouge en lui accordant une large place dans l'espace public. On construits des parkings immenses. On bâtit des autoroutes. Comme dans de nombreux autres pays d'Europe occidentale, les Pays-Bas n'échappent pas à la règle, même Amsterdam se remplit de voitures.

Parisien, toi aussi tu peux devenir amstellodamois !

Oui, même Amsterdam ! La ville, citée maintes et maintes fois comme le paradis du vélo, ne l'a pas toujours été. Et ce n'est pas une légende urbaine. Preuve à l'appui, voici des photos prises au cœur de la capitale batave voici quelques décennies. Oui, là-bas aussi, la bagnole avait envahi l'espace.

C'est moche, n'est-ce pas ? Et il s'agit pourtant bien d'Amsterdam, dans les années 50-60. (Source : Beeldbank Amsterdam)

Pour parfaitement voir la différence entre le passé et le présent de cette ville, je vous invite à aller voir le travail de Cornelia Dinca et Thomas Schlijper.

L'une est urbaniste, l'autre est photographe. Sur une idée originale de Marco te Brommelstroet (Fietsprofessor, tweet ci-dessus), tous deux ont monté le projet "Sustainable Amsterdam" qui met justement en lumière et en image, l'incroyable transformation urbanistique de le ville.

De la bagnole au vélo

Qu'est ce qui va déclencher la profonde transformation d'un pays auto-centré vers un pays vélo-centré ? Tout d’abord, un éveil des consciences lors du premier choc pétrolier de 1973. Quand l'Arabie Saoudite impose un embargo sur le baril, le pays, comme d'autres pays scandinaves, prend conscience de son extrême dépendance au pétrole.

Les néerlandais sont invités par le gouvernement à sérieusement changer leurs habitudes et à économiser de l'énergie. Les dimanches sans voitures sont lancés. Le peuple batave se souvient tout-à-coup ce qu'était leur vie avant l'hégémonie de la voiture. 

A voir, cette excellente vidéo réalisée par le blogueur Mark Wagenbuur de BicycleDutch [En] :

Avant la crise du pétrole, la recrudescence des accidents de voiture et notamment des enfants renversés va faire également monter au créneau les familles. Rien qu'en 1971, 400 enfants trouvent la mort dans un accident de la circulation. Les activistes du mouvement "Stop de Kindermoord" - littéralement "Arrêtez l'infanticide" - ont été très virulents durant les années 70, organisant des manifestations pour dénoncer les points noirs et bloquant des rues entières pour laisser jouer les enfants.

La pollution augmentant inexorablement, les années 80 vont donc voir arriver de nombreuses mesures politiques pro-vélo dans les villes néerlandaises. La suite de l'histoire, vous la connaissez. En adoptant une politique pas nécessairement anti-voiture mais en accordant de plus en plus de place aux piétons et vélos, l'espace urbain s'est peu-à-peu transformé pour devenir ce que les néerlandais connaissent aujourd'hui.

Pour ceux qui ont eu la chance de se balader à Amsterdam, ou tout autre ville des Pays-Bas, ont pu se rendre compte de la douceur de vivre qu'il y règne. Et pourtant, la majorité des habitants ne se baladent pas à vélo, ils se déplacent avec, vont au travail, partent chercher les enfants à l'école, font leurs courses... Là-bas, le vélo n'est pas qu'un loisir, c'est avant tout un moyen de transport.

Ni une histoire de culture, ni une histoire de gène

Alors chers automobilistes, avant de crier aux loups et trouver de faux prétextes pour continuer de prendre votre voiture, sachez qu'il existe d'autres moyens pour vous déplacer. Marche à pied, transports en communs (la plupart des grandes villes françaises ont un réseau efficace, c'est le cas de Paris) et bien sûr, le plus simple, rapide et économique, le vélo.

Même vous, vous aspirez à vivre dans une ville calme et apaisée. Une ville dans laquelle vous pourriez vous déplacer sans subir les conséquences d'une circulation automobile dense et tout ce qu'elle entraîne : emprise sur l'espace public, pollution aérienne, sonore et visuelle. Une ville dans laquelle vous laisseriez sans souci vos enfants se déplacer à pied ou à vélo.

Ce n'est ni une histoire de culture, ni une histoire de gène. C'est avant tout une question de bon sens, de volonté et d’acceptation du changement. La ville, telle qu'elle a été conçue aujourd'hui, intégralement centrée sur le déplacement motorisé, n'est plus concevable aujourd'hui. Les alternatives existent.

Les décisions courageuses sont souvent les moins populaires. Et sans prendre aucun parti-pris (la politique ce n'est vraiment pas mon truc), les décisions que prend actuellement Paris, comme celle que prennent des tas d'autres municipalités en France, accordant toujours plus de place aux déplacement actifs, vont dans le bon sens.

A vous de savoir si vous avez envie de continuer à les subir ou bien à modifier dès maintenant vos comportements et vos petites habitudes. Essayez, et vous verrez, votre vie va changer...

Cela étant dit, avant d'enfourcher votre vélo, attention de bien être sûr que l'infrastructure cyclable est ouverte et en fonctionnement... 

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