[Municipales 2020] Lyon, Rennes, Toulouse... Un potentiel vélo révélé mais des efforts insuffisants
[Municipales 2020] Lyon, Rennes, Toulouse... Un potentiel vélo révélé mais des efforts insuffisants

[Municipales 2020] Lyon, Rennes, Toulouse… Un potentiel vélo révélé mais des efforts insuffisants

Des possibilités cyclables mais il reste du (velo)taf

Article publié le mardi 14 janvier 2020 à 13h32 et mis à jour le mardi 04 février 2020 à 11h12.

En se basant sur le rapport du Réseau Action Climat (RAC), de Greenpeace France et de l'Unicef France à propos de la lutte contre la pollution atmosphérique, et en patientant avant les résultats attendus du baromètre vélo, Weelz vous propose un tour d’horizon des espoirs, des avancées et des paralysies qui ont marqué ce dernier mandat dans les treize principales métropoles françaises.

Après notre première étape consacrée aux métropoles en pointe, place à celles qui pourraient les imiter au prochain mandat, mais qui n’ont pas bénéficié de progrès aussi importants depuis 2014 : Lyon, Rennes et Toulouse.

Lyon, une bonne progression ternie par des points noirs

Depuis 2014, le pont Raymond-Barre, réservé au tramway et aux modes actifs, relie les 2 et 7e arrondissements de Lyon

Comme Nantes, Lyon reste timide sur la sortie des véhicules polluants et la réduction de la place de la voiture dans l’espace public. Encore au stade de projet, le très décrié « Anneau des Sciences », 14 km qui viendrait boucler à l’ouest le périphérique lyonnais, est déjà au cœur de la campagne.

"la dynamique vélo est incontestablement l’une des plus remarquables en France"

La part des déplacements à vélo reste faible (2,5% dans la ville-centre, 1,7 % dans la métropole) à tel point que ces chiffres suscitent des doutes parmi les associations. Mais la dynamique vélo est incontestablement l’une des plus remarquables en France : la pratique, marginale en 2001, a été multipliée par 5 depuis lors.

Certains axes importants ne sont toujours pas dotés d'aménagements cyclables en 2020, comme par exemple l'avenue Berthelot (7e et 8e arrondissements), où seules quelques sections bénéficient de pistes inconfortables

Avec un budget vélo dédié dépassant les 20 €/habitant/an, Lyon fait partie des très bons élèves côté investissement public. L’offre de stationnement est supérieure à la moyenne des autres métropoles (1 place pour 41 habitants), contrairement à l’offre de vélos en location, qui pourrait être nettement étoffée (1 vélo pour 311 habitants, un niveau comparable à Toulouse ou Nice).

Le Vélo'v lyonnais, premier système informatisé de vélos en libre-service à grande échelle mis en place en France, en 2005. Contrairement à Vélib' à Paris, l'entreprise JCDecaux est restée exploitant du service

En revanche, on regrette l’absence d’un réseau express vélo alors même que les berges du Rhône sont très empruntées par les vélotafeurs qui doivent se contenter à l’heure actuelle d’aménagements partagés et trop étroits, comme sur les berges du Rhône. Les candidats aux municipales ne s’y trompent pas : presque tous proposent la réalisation d’un tel réseau, sans donner plus de détails. 

A Lyon, les berges du Rhône ont connu une transformation radicale dans les années 2000 : sur plus de 5 km, les parkings sont devenus une voie partagée pour les modes actifs

D’autant que des axes cristallisent la critique des usagers du vélo : la grande rue d’Oullins (dans la commune éponyme, en première couronne) saturée par le transit automobile, l’avenue Berthelot, qui doit se contenter de pistes sur trottoirs... Sur le pont de la Mulatière, les pistes qui flanquent l’autoroute sont restées unidirectionnelles malgré la coupure urbaine que constitue le lieu.

La piste en direction de Lyon est même partagée avec les piétons, ce qui la rend inconfortable. Sans compter le remplacement de voies mixtes bus-vélos par des bacs à fleurs dans certaines rues de la Presqu'île (où se maintiennent des voies sur quais à 2x4 voies) et la réduction de la place allouée au vélo dans le quartier de la Part-Dieu, qui ont attisé les tensions entre la ville et les associations.

A contrario, une innovation mérite d’être saluée : la fermeture aux automobilistes du début du cours Lafayette (côté Rhône), un axe où des feux clignotants ont été disposés tout le long du tracé du bus C3 pour permettre aux cyclistes de franchir les intersections en même temps que les bus, désormais prioritaires. 

Rennes, quelques avancées, beaucoup d'inertie

Rennes, place Maréchal Foch : des cyclistes fréquentent une piste sur trottoir (mieux délimitée par du marquage depuis 2019) face à l'immeuble Cap Mail, signé par l'architecte Jean Nouvel

La situation de Rennes est très représentative des métropoles encore trop timides : le budget dédié au vélo y reste insuffisant et en inadéquation avec les intentions du plan vélo, qui visait 20 % de part modale en 2020.

"la part du vélo est restée stable à Rennes, mais elle a diminué dans la métropole"

Non seulement la part du vélo est restée stable à Rennes, mais elle a diminué dans la métropole depuis 2007, passant de 4,3 % à 3,7%, selon la dernière enquête, même si les distances parcourues à vélo par les métropolitains ont augmenté de manière significative (+34 %).

Rennes, sur la rive ouest de la place de Bretagne. La construction de pistes cyclables sur cette place, qui constitue l'un des points inévitables de la circulation nord-sud et est-ouest dans le centre, a été l'un des chantiers phares du mandat de la maire élue en 2014, Nathalie Appéré

Le mandat a été marqué par quelques polémiques – des travaux à rebondissements sur un point noir appelé à devenir l’un des cœurs du réseau cyclable, la place de Bretagne, ou encore l’ouverture du parking sud de la gare – et quelques expérimentations intéressantes, comme l’amélioration de la visibilité des sas vélos.

Rennes gagne également des points avec son service de location de VAE (avec option d’achat), le plus important de France, dépassé par son succès : 1800 nouveaux vélos sont proposés chaque année. Avec 1 vélo en location pour 180 habitants, la capitale bretonne est même en troisième place derrière Grenoble et Strasbourg en offre de service. Quant au stationnement, avec 1 place pour 39 habitants, la métropole se positionne aussi en bonne place, derrière Strasbourg, Bordeaux et Grenoble. 

Le quai de la Prévalaye, entre le centre et le quartier Bourg-l'Évesque, s'est vu doté de la meilleure piste cyclable rennaise selon l'association locale Rayons d'Action : une bidirectionnelle large, avec séparateur végétalisé

« Le vélo et sa place dans la ville seront l’un des thèmes majeurs de la campagne des municipales de Rennes et dans les communes de la métropole » annonçait Ouest-France ce mois-ci suite à la présentation publique d’un plaidoyer “Ensemble pour une métropole cyclable” préparé par Rayons d’Action, l’association locale des usagers, durant laquelle tous les candidats étaient présents ou représentés.

Afin de mettre en lumière le différentiel d’attention porté aux différents modes aptes à se substituer à l’usage de la voiture solo, Rayons d’Action a rappelé que Rennes Métropole a consacré ces dernières années 900 € en moyenne par an et par habitant pour les transports en commun (budget conséquent lié à la construction d’une deuxième ligne de métro), contre 10 € seulement pour le vélo.

A l'entrée ouest de la place de Bretagne, sur un pont réservé aux bus et aux usagers du vélo

L’association préconise d’augmenter la qualité des aménagements cyclables pour permettre à toutes et tous de s’y déplacer quel que soit l’âge, les capacités physiques et le modèle de vélo utilisé. À cet égard, le réseau express vélo, réalisé très partiellement sous ce mandat à la fois dans la ville-centre et en périphérie, pourrait changer la donne au prochain mandat : son achèvement est annoncé pour 2024.

Toulouse, entre timidité et ambition

La rue d'Alsace-Lorraine, une des principales voies commerçantes de Toulouse, est devenue en dix ans quasi intégralement piétonne. Les usagers du vélo doivent parfois se frayer un chemin, faute de piste cyclable, et les accrochages sont fréquents

Toulouse dispose d’un budget vélo/habitant/an qui a augmenté dans les dernière années du mandat, pour rejoindre le niveau de Bordeaux ou Lyon (plus de 20 €/an/habitant), un montant qui correspond en fait à celui envisagé dans le plan vélo voté... en 2011. À l’horizon 2022-2023, le Conseil départemental a en outre annoncé le financement et la réalisation d’un réseau express vélo à cinq axes qui concerne sur quelques tronçons le territoire toulousain, dans des secteurs qui souffrent de la congestion automobile.

Toulouse aura son réseau express vélo, si l'on en croit Tisséo, l'autorité organisatrice des mobilités locale. Tisséo s'est largement appuyé sur les propositions de l'association Deux pieds deux roues pour déterminer la structure du réseau et les itinéraires

En tout, ce ne sont pas moins de 13 nouvelles lignes couvrant 385 km qui sont annoncées. Le schéma directeur cyclable d’agglomération a ainsi validé un investissement conséquent de 25 millions d’euros par an en vue de ce projet et au regard des discontinuités et ddes axes non aménagés.

En attendant, que ce soit du côté de l’offre de stationnement ou du réseau cyclable métropolitain existant, la situation n’a pas grandement évolué lors de ce mandat. Le service de location reste apprécié, mais la plupart des pôles d’échanges restent dépourvus en stationnement (1 place pour 72 habitants en moyenne), et la plupart des boulevards et des carrefours restent simplement dotés de marquages.

"l’agglomération hérite de plusieurs décennies de politique d’adaptation à la voiture"

Comme Bordeaux, l’agglomération hérite de plusieurs décennies de politique d’adaptation à la voiture, et malgré la construction d’une troisième ligne de métro très coûteuse, beaucoup de travail reste à accomplir pour le rééquilibrage de l’espace public au profit des piétons et des cyclistes.

Place du Capitole, le cœur historique de Toulouse. Malgré l’absence d’information visible en surface, un parking à vélos sécurisé et ouvert 24h/24 propose 467 places sous la place

La métropole ne se distingue donc pas grâce à la limitation de la place de la voiture, ce qui rend d'autant plus ambitieuses les récentes propositions de l'association locale Deux pieds deux roues. Une d’entre elles est la mise en place d'une zone à trafic limité dans l'hypercentre (pour couper notamment le transit automobile sur l'axe est-ouest empruntant la rue de la République, le Pont-Neuf, la rue de Metz).  Une autre proposition, à plus long terme, consiste en la requalification du périphérique en boulevard urbain pour y intégrer des aménagements cyclables, désenclaver certains quartiers, réduire la circulation automobile et les nuisances liées.

Si Toulouse avance pas à pas sur une zone à faibles émissions (ZFE) intégrant les voitures, les scénarios à l’étude se limitent à des restrictions pour les véhicules les plus anciens et n’incluent pas d’objectif de sortie progressive du diesel et de l’essence.

A (re)lire dans notre dossier spécial vélo Municipales 2020 :

[Municipales 2020] Qu'a fait votre métropole pour le vélo depuis 2014 ?
[Municipales 2020] Grenoble, Paris, Bordeaux, Strasbourg… ces métropoles où le vélo progresse
[Municipales 2020] Lille, Nantes, Rouen: ces métropoles où le vélo fait du surplace
[Municipales 2020] Montpellier, Nice, Marseille: ces métropoles où tout reste à faire pour le vélo

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