Mobilité : l'usage de la voiture particulière régresse selon l'INSEE
Mobilité : l'usage de la voiture particulière régresse selon l'INSEE

Mobilité : l’usage de la voiture particulière régresse selon l’INSEE

Le vélo c'est bien (pour les autres)

Article publié le mardi 26 janvier 2021 à 08h46 et mis à jour le vendredi 29 janvier 2021 à 16h02.

Début 2017, nous vous avions résumé l'analyse¹ de l'institut de sondage français INSEE sur les habitudes de mobilité des citoyens français. En se fondant sur des chiffres récoltés durant l'année 2015. C'était la première fois que l'organisme séparait enfin, à l'intérieur de sa catégorie deux roues, le vélo des deux roues motorisés. Ce qui a permis une analyse plus fine de l'usage de la bicyclette dans l'hexagone. On y apprenait notamment que seulement 2% des actifs se rendait au travail en utilisant à vélo.

Un autre chiffre ressortait de cette étude, encore plus édifiant. Il apparaissait que pour des trajets d'un kilomètre ou moins, les français étaient encore 58% à privilégier l'usage de l'automobile. Mais cela étant dit, cette donnée était souvent remise en cause. Car dans la méthode de calcul de l'INSEE, il semblerait que lorsque le répondant habitait et travaillait dans la même commune, la distance retenue² restait 1 km. Toutefois, même sur des distances de 5 km ou moins, l'usage voiture restait prégnant : 75%.

Nouveaux chiffres, nouvelle étude, nouvelle méthode

Ce mois-ci, l'INSEE dévoile une nouvelle étude³, se fondant sur des chiffres de recensement plus récents (2017), et quelques données comparées entre 2015 et 2020. Quatre ans plus tard, les choses n'ont pas réellement changé : "La voiture est le mode de transport privilégié pour aller travailler quelle que soit la distance parcourue." d'après l'institut. Toutefois, il semble que l'usage de l'automobile particulière marque un recul. Un recul très léger, mais un recul tout de même : 72,8 % des actifs en emploi ont utilisé la voiture pour se rendre à leur travail en 2020, contre 73,7% en 2015. Soit une baisse de 0,9%. L'usage vélo, quant à lui, a gagné 0,9%, de 2% en 2015 à 2,9% en 2020.

L'usage de la voiture (en vert) demeure hégémonique, même sur les très petites distances

Quand on regarde de plus près le graphique, on constate sur cette fameuse distance d'un km ou moins, l'usage de la voiture est de 48,8%. Ce qui correspondrait à une baise de pratiquement 10% en comparaison des chiffres de 2016. Peut être pas. En réalité, ce qui a changé, c'est la méthode d'analyse de l'INSEE et son distancier Metric-OSRM. What ?! L'institut affirme qu'il "fournit, pour la première fois et pour cette étude, les distances routières entre lieu de résidence et lieu de travail avec plus de précision que dans les études précédentes". Cela signifie que les adresses des lieux de travail et des domiciles des répondants n'ont pas été définies en fonction de la commune indiquée, mais géolocalisées. "Dans les trois quarts des cas, les lieux de travail et de résidence sont géolocalisés à leur adresse précise." déclare l'INSEE. On obtient donc une donnée plus fine, plus précise et probablement plus proche de la réalité.

Cela n'en reste pas moins intéressant. Inquiétant ou prometteur ? Cela dépend du point de vue ; le fameux verre à moitié plein ou à moitié vide. Inquiétant parce que, oui, Les français sont encore tellement attachés à leur voiture qu'ils sont donc encore près de 50% à la privilégier, même pour des trajets de l'ordre de la micro-distance. "l’utilisation dominante de l’automobile n’est pas seulement liée à la longueur du trajet domicile-travail" constate l'INSEE.

Prometteur ? Parce que, par ailleurs, nous le savons tous, la distance à parcourir n'est pas le seul paramètre de décision. Si l'on pense système vélo, la qualité des voies cyclables est un élément, la facilité pour parquer son vélo un autre, la qualité de l'équipement (vélo, protections contre la pluie, le froid) encore un autre. Prometteur donc, parce qu'il y a bien un potentiel de développement de l'usage du vélo incroyable. On y vient !

Développer le vélo, c'est bien (pour les autres)

"Si seulement j'avais pris le vélo ce matin..."

Les sondages et les données chiffrées sont toujours à prendre avec des pincettes (même lorsque cela vient d'un institut très sérieux comme l'INSEE). Ces données n'en restent pas moins intéressantes à analyser, avec le recul nécessaire. On évite ainsi les constatations au doigt mouillé de certains pseudo-experts persuadés qu'on en fait toujours trop pour les cyclistes et ne perçoivent pas de problème de l'usage massif de l'automobile.

On regrettera toutefois sur l'aspect mobilité vélo, l'INSEE ne mettent pas en corrélation la présence - ou non - d'infrastructure cyclable et l'impact que cela peut avoir sur l'usage vélo dans les territoires. Dans la dernière étude, il apparaissait notamment que les départements alsaciens étaient les zones où l'on pédalait le plus. De là à mettre cela en relation avec l'excellent maillage cyclable très germanique de ce territoire...

L’Observatoire des mobilités émergentes – Hors-série

Ce qui est assez cocasse, c'est mettre en corrélation cette étude de l'INSEE avec cette autre étude, publiée par L'ObSoCo (l'Observatoire Société & Consommation) en partenariat avec l'Ademe, la SNCF et le cabinet Chronos. L'étude constate le changement de mobilité des français. Les périodes de confinement et de déconfinement ont réduit les déplacements (télétravail, recours au drive, au e-commerce...) mais ont aussi augmenté les déplacements locaux : "Une mobilité de proximité qui induit une hausse de la marche et du vélo".

Sur 4 500 personnes interrogées, entre 18 et 75 ans, 79% d'entre eux se disent favorables, voire très favorables, à l'égard du développement des pistes cyclables". On a donc d'un coté une majorité écrasante de la population française qui continue d'utiliser sa voiture, mais de l'autre une opinion favorable au développement des infrastructures cyclables et donc du vélo. Quels enseignements tirer de cela ?

En réalité, on a un début de réponse lorsque l'on va plus loin dans l'étude. Si près de 80% des répondants se disent pour le développement du vélo, ils sont encore 65% à penser que "on ne pourra jamais complètement abandonner la liberté que procure la voiture pour nos déplacements." (fait que nous reconnaissons volontiers). Mais surtout, les français sont seulement 35% à penser qu'il faudra "abandonner la voiture pour d'autres modes de transports afin d'éviter les nuisances qu'elle provoque". En d'autres termes, on pourrait résumer l'opinion hexagonale sur la mobilité active, ce serait : développer le vélo, c'est très bien ... pour les autres.

Bien sûr, il pourrait y avoir un autre niveau de lecture, en croisant les chiffres. Comment intégrer la temporalité des études entre INSEE et L'ObSoCo. Quand l'INSEE collecte des chiffres entre 2015 et 2020, il y a forcément un biais de tempo. Le bouleversement des habitudes d'usage, dans les grandes villes en tout cas, a été fortement accéléré entre mars 2020 (amorcé dans les faits en décembre 2019 avec la grève des transports) et aujourd'hui. Les cyclistes du quotidien ont poussé comme des champignons à l'aune des confinements, déconfinements. On peut supposer que les chiffres de l'INSEE sont plus complets que ceux de l'ObSoCo. On peut aussi supposer que cette dernière étude intègre mieux les changements opérés ces derniers mois, bien que le panel interrogé soit réduit. Il conviendra de suivre de prêt l'évolution de ces usages le jour où nous pourrons reprendre une vie normale. Tout porte à croire que ce n'est pas demain d'une part. D'autre part, que sera une mobilité normale ? Faudra-t-il attendre trois ans que L'INSEE nous le dise ?

¹ "Partir de bon matin, à bicyclette…" - Frédéric Tallet, division Méthodes et traitements des recensements, Vincent Vallès, pôle Recensement de la population, Insee.

² D'après l'INSEE, dans son étude de 2017, la distance domicile-travail est la distance routière entre les chefs-lieux des communes de résidence et de travail arrondie au kilomètre entier supérieur.

³ "La voiture reste majoritaire pour les déplacements domicile-travail, même pour de courtes distances" - Chantal Brutel, Jeanne Pages (Insee).

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