Voitures et motos n'ont pas besoin de plus de partage, mais de plus de contraintes
Voitures et motos n'ont pas besoin de plus de partage, mais de plus de contraintes

Voitures et motos n’ont pas besoin de plus de partage, mais de plus de contraintes

Article publié le lundi 18 juin 2018 à 13h36 et mis à jour le lundi 13 avril 2020 à 14h49.

Il y a quelques jours, trois associations d'usagers de la route se sont réunies pour lancer un appel à un meilleur partage de la route. Coté voiture, il s'agit de 40 millions d'automobilistes (40MA), coté deux-roues motorisés, de la Fédération Française des Motards en Colère (FFMC) et coté vélo, de Mon Vélo est une Vie (MVEUV).

Cool attitude

Loin de moi l'idée de remettre en cause le bien-fondé de ces associations. elles font probablement du très bon travail concernant leurs usagers respectifs (automobilistes, motards ou cyclosportifs). Mais, permettez-moi de le dire, concernant le déplacement en milieu urbain, elles sont totalement à côté de la plaque.

Depuis près d'un demi-siècle, les politiques d'urbanisme successives n'ont travaillées qu'à une seule chose : donner de plus en plus de place aux déplacements motorisés, en élargissant les voies et en permettant des vitesses de plus en plus hautes. Tout cela bien sûr au détriment des autres usagers - piétons et cyclistes - en grignotant de plus en plus sur leur espace.

Je le dis haut et fort face à ces associations : aujourd'hui, en milieu urbain, nous n'avons clairement pas besoin d'un meilleur partage de la route, mais d'une réduction de la place donnée aux véhicules motorisés. Pourquoi ? Pour trois raisons :

La pollution

Les véhicules motorisés (voitures, motos, scooters) sont polluants. Ceux-ci sont à l'origine des deux principaux polluants que sont les particules PM10 et le dioxyde d’azote (NO2). La récente étude de l'agence Santé publique estimait à 48 000 le nombre de décès dus directement à cette exposition aux particules fines.

Un meilleur partage de la route ne répond pas au problème de pollution.

L'emprise sur l'espace public

Les véhicules motorisés (voitures, motos, scooters) sont dévoreurs d'espace. En moyenne, plus de 50% de l'espace public est occupé par l'automobile. Quant aux motos et scooters, leur gabarit est 3 à 4 fois supérieur à celui d'un vélo.

Un meilleur partage de la route ne fera pas baisser cette occupation d'espace.

La sédentarité

Les véhicules motorisés (voitures, motos, scooters) sont contre-productifs en terme de santé publique. Ils sont tellement devenus une réponse logique au déplacement, que tout le monde juge parfaitement normal d'utiliser une voiture (une moto ou un scooter) même pour un déplacement inférieur au kilomètre !

Parallèlement, la sédentarité est devenue un fléau. L'inactivité physique est le quatrième facteur de risque de maladies tel que diabète, maladies cardiovasculaires et certains cancers. L'OMS recommande 150mn d'une activité modérée (marche à pied, déplacement à vélo) par semaine.

Un meilleur partage de la route ne répondra pas au problème de sédentarité.

Contrainte et report modal

Je le reconnais pourtant volontiers, la voiture, comme la moto ou le scooter, sont de belles inventions. Elles permettent de couvrir des distances importantes, en peu de temps, ce que ne permet pas le vélo. Faute d'une offre de transport public efficace et/ou abordable pour tous¹, ces véhicules restent donc efficients en zone rurale ou extra-urbaine.

Mais aujourd'hui on ne peut clairement plus accepter que ce type de véhicule serve à 75 % pour des déplacements inférieurs à 5 km et en grande majorité en zone urbaine !

"Ce n'est pas d'un meilleur partage de la route dont on a besoin, mais d'une incitation au report modal" Appeler au respect mutuel est louable, mais nous savons tous très bien que cette méthode est inefficace.

Ce n'est pas d'un meilleur partage de la route dont on a besoin, mais d'une incitation au report modal, c'est-à-dire à l'abandon du déplacement motorisé. La contrainte reste malheureusement la seule solution efficace aujourd'hui.

Il faut réduire la place donnée aux véhicules motorisés pour en donner plus aux piétons et aux cyclistes. Il faut récupérer l'espace dévolu au déplacement motorisé pour construire de meilleure infrastructures piétonnes et cyclables.

Tout cela aura pour conséquence une baisse des taux de pollution, une augmentation du nombre de cyclistes et piétons dans les rues, ainsi qu'une amélioration de leur santé (entraînant par là même une baisse conséquente des dépenses de l'État en termes de santé publique).

Dans son engagement pour le transport du quotidien, l'Etat doit aussi jouer son rôle, à la fois pour la mise en place d'un véritable plan vélo, mais aussi pour améliorer les dessertes interurbaines (trains, autoroutes cyclables...), pour, encore une fois, réduire l'utilisation massive de la voiture.

Globalement, mon avis sur la question a été parfaitement résumé dans cet article : "Je suis cycliste quotidien et vous devriez me remercier". Et pour aller plus loin sur toutes ces questions :

Non, le déplacement à vélo n’est pas une régression.
58% des trajets domicile-travail de moins d’1km se font en voiture.
Etude: Un réseau cyclable efficace peut sauver des vies.
Moins de véhicules thermiques, 3 semaines d’espérance de vie supplémentaires.
Vidéo: Oslo va bannir les voitures de son centre-ville d’ici 2019.

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